- L’histoire de ce lieu

Nafpaktos, ville connue depuis l’Antiquité, dont le nom provient de la contraction des mots « nafs »” et « pignymi », ce qui signifie « construire un navire ». Les premières références à la ville remontent à 1104 avant J.-C., lorsque les Doriens sont venus dans la région pour construire des navires et se rendre en face dans le Péloponnèse.
Sa position géographique privilégiée, à l’entrée du golfe de Corinthe, en a fait une pomme de discorde aussi bien dans l’Antiquité qu’aux époques byzantine et moderne. Ville à l’origine des Locriens, elle est prise en 454 av. J.-C. par les Athéniens qui, lors de la guerre du Péloponnèse, l’utilisent comme base pour d’importantes opérations maritimes et terrestres. Locriens, Athéniens, Messéniens, Achéens, Thébains, Macédoniens et Étoliens se succèdent à la tête de Nafpaktos pour façonner sa longue et belle histoire. À partir de 338 av. J.-C., elle devient le centre de la Ligue étolienne et le lieu des conseils respectifs. En 191 av. J.-C., Nafpaktos est assiégée par les Romains et, après sa capitulation, elle passe aux mains des Locriens pour devenir politiquement dépendante de la colonie romaine de Patras.
Le rôle important de Nafpaktos au cours de la période protobyzantine est également marqué par l’existence de puissantes fortifications, mentionnées, dès le 6e siècle, par l’historien byzantin Procope de Césarée. De plus amples informations nous sont parvenues sur Nafpaktos pendant la période byzantine moyenne. Il est possible qu’après 880, Nafpaktos soit devenue la capitale du thème de Nicopolis et que l’évêché de Nafpaktos ait été élevé au rang de « métropole de l’ancienne Épire ». C’est également à cette époque, devenue l’une des bases importantes de la flotte byzantine des compagnies occidentales, qu’elle possède un chantier naval. Au cours de cette même période, l’importance commerciale du port de Nafpaktos augmente et la ville est citée comme étant une escale pour les voyages diplomatiques à destination et en provenance de Constantinople.
Après la chute de Constantinople aux mains des Francs en 1204, Nafpaktos est, pour une courte période, sous le contrôle des Vénitiens, qui la désignent dans leurs sources sous le nom de Lepante, tandis que, quelques années plus tard, par le traité de 1210, elle passe entre les mains du fondateur du despotat d’Epire, Michael I Ange Comnène Doukas. Probablement est-ce la période pour laquelle nous disposons des données les plus complètes sur l’histoire de la ville, grâce à deux figures charismatiques montées sur le trône épiscopal à la fin du XIIe et au début du XIIIe siècle : Constantin Manassès et Jean Apokaukos. Apokaukos, en particulier, est une source importante pour la situation existant dans la région de Nafpaktia au début du XIIIe siècle. Le tableau qu’il en décrit est sombre. Des déplacements de population en raison de catastrophes naturelles et des raids de pirates provoquent une baisse de la population. En 1294, Nicéphore Ier Ange Comnème Doukas donne Nafpaktos en dot à Philippe Ier de Tarente, membre de la dynastie des Anjou, qui ont ainsi consolidé leur domination dans la région pendant environ un demi-siècle. Philippe Ier fortifie la ville et frappe sa propre monnaie selon les normes occidentales. La guerre civile entre Andronikos II et Andronikos III Palaiologos sur le sort de l’Epire mais aussi l’expédition de Gautier V de Brienne contre les Catalans sont des évènements qui créent un climat d’insécurité et, petit à petit, une vacance du pouvoir À partir de 1361, les Albanais, après avoir vaincu les forces du Despotat d’Épire, avancent progressivement en Grèce occidentale et, en 1380, ils deviennent les maîtres de Nafpaktos.
Après la reddition de la ville par les Albanais aux Vénitiensen 1407, Nafpaktos acquière de nouvelles fortifications et l’agglomération prend quasiment sa forme actuelle, avec le château et le port ; elle devient l’un des ports les plus importants de la mer ionienne. En 1499, une guerre éclate entre l’Empire ottoman et Venise pour le contrôle de la mer Égée et de la Méditerranée orientale. Les Ottomans l’emportent et s’emparent de toutes les possessions vénitiennes, y compris Nafpaktos. Ils fortifient encore davantage le château et le port et érigent de nombreux bâtiments publics dans la ville et dans la région, notamment les châteaux jumeaux (Rio-Antirio), surnommés les « Petites Dardanelles », à l’entrée du golfe de Corinthe.
Alors que l’Empire ottoman se renforce et que le danger de son expansion vers l’Ouest devient évident, les dirigeants européens s’allient pour l’arrêter. À l’initiative du pape Pie V, la Sainte-Ligue est formée avec la participation de l’Espagne, de la République de Venise, de Rome, du duché de Savoie, de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem et de la République de Gênes. En octobre 1571, avec le prince Don Juan d’Autriche comme commandant en chef de la flotte chrétienne, la célèbre bataille navale de Nafpaktos a lieu à l’embouchure de l’Acheloos, près des îles Échinades.
La bataille navale de Nafpaktos est l’un des événements les plus importants du début de l’époque moderne. Se déroulant à l’entrée du golfe de Patraikos, près des îles Échinades, elle prend les dimensions d’une croisade. Probablement s’agit-il du dernier grand conflit entre l’Occident chrétien catholique et l’Islam. La bataille navale marque la fin des ambitions de l’Empire ottoman pour la domination totale de la Méditerranée et l’expansion vers l’Italie et les côtes de France et d’Espagne. Cependant, bien qu’il s’agisse d’une victoire symbolique, les États membres de la Sainte-Ligue (l’Espagne des Habsbourg, Venise, Gênes, l’Etat des chevaliers de Malte et l’Etat pontifical) tentent, chacun de leur côté, de conclure un traité de paix avec les Ottomans afin d’éviter toute répercussion sur la fluidité des échanges commerciaux.
La victoire de la flotte chrétienne, qui est donc d’une importance historique capitale pour l’avenir de l’Europe, n’apporte pas les résultats escomptés pour les Grecs, qui espèrent se libérer du joug ottoman. En 1687, les Vénitiens, sous le commandement de Morosini, reprennent temporairement Nafpaktos jusqu’en 1699, date à laquelle ils la rendent aux Ottomans, conformément au traité de Karlowitz. La ville est libérée en avril 1829, par un traité signé par Augustinos Kapodistrias, frère du gouverneur grec Ioannis Kapodistrias, qui est resté dans la région en tant que commandant. Après sa libération, de nombreuses familles de combattants, principalement de Souli, se sont installées dans la ville.